EMMANUELLE MARIE POUR S'EN SOUVENIR ENCORE ET ENCORE...
Hier soir dans les salons de la Société des Auteurs (SACD) les Ecrivains Associés du Théâtre remettaient pour la première fois "Le Prix des Cents Livres -
Emmanuelle Marie". Un prix généreux qui récompense une
structure qui oeuvre en direction du théâtre contemporain et des auteurs vivants. Pour honorer à ma façon la mémoire de cette auteur(e) si talentueuse, je voulais vous faire partager un texte que je trouve admirable. Il a été écrit pour Isabelle CARRÉ, son interprète et amie. Avec l'accord de son mari Jacques DESCORDES, je vous offre ici la possibilité de le découvrir en imaginant la grâce magique d'Isabelle CARRÉ l'interprétant.....


" Pour Isabelle C." Emmanuelle MARIE
Ouvrez-moi...ouvrez-moi s'il vous plaît..ouvrez-moi ça sortira mieux...je veux dire...les mots sont si petits...ouvrez...qu'on les entende...Ouvrez! Ouvrez en deux la comédienne! Et regardez dedans! Regardez...dedans...tiens oui...regarder dedans:(SUITE...(cliquez)
Commencez par la boîte crânienne justement, la coque, la caboche, poursuivre en suivant le chemin du scalpel: commissure des hémisphères, méninges, cervelet...Puis se pencher un instant sur le tas...pour comprendre...oui...examiner la chose: chair nerfs viscères...dédale...sang et os...beark c'est dégoutant...A bien y voir on y voit rien n'est-ce pas. Ni plus ni moins que ce que l'on voit aux étals des bouchers ou sur un écorché. Non rien...Déçue. Désemparée...Un peu comme un enfant aurait ouvert en deux une boule à neige, cassé le verre, pressé d'en percer le mystère: eau répandue à ses pieds, paillettes éteintes et rien de plus. Rien. Plus rien de la magie, la neige est envolée: Dans le tas des viscères que reste-t-il des bruits de pas de la comédienne sur le plancher de la scène: rien il ne reste plus rien. De la voix qui tremble aux premiers mots, du corps suspendu: rien. Rien de la salle qui vibre attentive à ses lèvres, rien des silences qui bruissent, dans l'attente d'une nouvelle histoire, d'une émotion encore, d'un rire: rien. Rien non plus de l'échange au-delà des regards au-delà de la voix, rien du souffle indicible, traversant, de la salle à la scène, de la scène à la salle, rien. Et de l'étoile que la comédienne a tracée dans l'espace, du bout de son index, rien il ne reste plus rien. Rien de tout cela. Dans le tas. Rien pas d'explication. Juste un chaos. Dédale.Sang et os. Ultime condition..."Il y a...quelque chose de pourri au royaume de Danemark..."