EN ATTENDANT...MOLIÈRE
La semaine prochaine, le 25 AVRIL aura lieu la remise des "MOLIÈRES", récompenses à la fois honnies et recherchées, méprisées et espérées. Malgré les réticences que je partage avec une grande partie de mes camarades, je continue à voter, tous les ans. Le vote est chez moi, une vilaine manie, comme vous l'aurez sans doute remarqué ! J'ai en effet la naïveté de croire que ma petite voix peut être utile pour faire pencher la balance, aussi sûrement "qu'un battemant d'ailes de papillon à New-York peut provoquer un typhon à Tokyo", mais oui, j'ai la naïveté de croire que ce prix peut aider la carrière d'un artiste émergent (comme on dit dans les salons très "hypes") ou bien mettre un coup de projecteur sur le chemin artistique d'un artisan trop discret. Et ça se passe quelques fois., même si la plupart du temps les MOLIÈRES volent au secours de la victoire et viennent poser un surplus de lauriers sur des têtes déjà surchargées d'honneurs. Pourtant cette année encore je suis heureuse de voter pour des artistes peu connus du grand public, mais pour qui j'ai eu un vrai coup de coeur cette saison SYLVAIN CREUZEVAULT pour "NOTRE TERREUR" et JOEL POMMERAT pour " CERCLES/FICTIONS"
Je m'apprêtais à "boucler mon vote", mais j'avais quelques scrupules à le faire sans avoir vu "ALEXANDRA DAVID NÉEL - Mon Tibet" qui figurait parmi les "moliérisables" (hou, quel vilain mot!), je me suis donc rendue au "PETIT MONTPARNASSE" jeudi dernier. J'y allais avec certains préjugés, "comment peut-on raconter les voyages de cette femme d'exception sur un petit plateau de théâtre avec deux comédiennes ?" "Je n'imagine pas un instant Hélène Vincent dans le rôle de ce monstre (sacré), cette comédienne fine et très menue, ne peut pas concorder avec l'image de la dame de l'Himalaya, forte, massive, hâlée"...Bref, des préjugés, stupides comme la plupart des préjugés ! Quand au premier faisceau de lumière, j'ai vu en fond de scène une silhouette cassée, déformée appuyée sur des béquilles enfouie sous des châles et d'où jaillissait une voix profonde, précise, autoritaire empreinte d'une intelligence lumineuse, j'ai "vu" Alexandra David Néel dans les dernières années de sa vie. La pièce raconte la force de vie de cette femme, qui, quelques mois avant sa mort (à 101 ans)
demandait un nouveau passeport et envisageait un grand voyage jusqu'à Vladivostok ! HÉLÈNE VINCENT réalise en osmose parfaite avec son personnage une performance REMARQUABLE. Les comédiens rêvent toute leur vie de "rencontrer" LE rôle , LE personnage où ils pourront montrer l'étendu de leur talent. Hélène Vincent l'a rencontré. Bien sûr, au théâtre comme sur un court de tennis, il n'y a pas de beaux matchs sans un partenaire à la hauteur et il serait injuste d'oublier EMILIE DEQUESNE qui lui donne une réplique forte et toujours juste...Nous verrons le résultat le 25 Avril , mais vous aurez compris que j'ai voté pour HÉLÈNE VINCENT pour le Molière de la meilleure comédienne.