LA NOSTALGIE N'EST PLUS ETC.
Bon, c'est toujours comme ça, Ma Maîtresse fait 36.000 choses, elle se disperse "façon puzzle" comme dirait Audiard - pas Jacques, Michel, son papa - et après il faut que je reprenne le clavier pour essayer de sauver les meubles. Elle griffonne des petits mots sur des sujets qu'elle aimerait traiter et puis elle les oublie sous le monticule de papiers qui envahit son bureau (voir photo)et c'est à moi ensuite, de mettre la main à la pâte ou plutôt la patte aux papiers (ça ne se voit pas mais je ris de mes bons mots)pour extirper l'idée oubliée. J'ai ainsi déniché sous une pile, une petite note très concise qui disait simplement: "La deuxième mort de M'sieur Moatti". Je n'ai pas l'autorisation de sortir dans Paris, bien trop dangereux pour les félines dans mon genre qui risqueraient l'enlèvement à chaque coin de rue. Donc, je ne connais de Paris que la vue que j'ai sur les toits depuis mes petits balcons, mais comme je suis curieuse, j'écoute, j'espionne, je capte, je fouille, j'enregistre et si je ne connais de l'extérieur que les quelques dizaines de mètres qui séparent mon immeuble de la porte du vétérinaire, je n'en ai pas moins entendu parler de la PLACE DES ABBESSES, là où se trouvait la fameuse LIBRAIRIE/PAPETERIE/JOURNAUX ouverte 363 jours par an et qui avait accueilli Ma Maîtresse pour la signature de son livre "LE JEUNE HOMME À LA CANNE", il y a deux ans. C'était là que régnait "M'sieur Moatti" dans son faureuil roulant, M'sieur Moatti , son caractère de chien et son humour acide, M'sieur Moatti natif du même pays que Ma Maîtresse, M'sieur Moatti devenu parisien et qui faisait partie depuis quarante ans du paysage de la PLACE DES ABBESSES au même titre que la fontaine Wallace, le manège ou la célèbre station de métro de Guimard. M'sieur Moatti était mort l'an dernier au début de l'été, dans sa librairie d'une crise de colère ou d'une crise cardiaque. Tous les habitués l'avaient pleuré, et Ma Maîtresse bien sûr. Et puis on avait dit que son fils reprenait le commerce. Il l'a fait. Il s'appelait aussi Moatti, mais c'était comme le "CANADA DRY", la boutique était la même, mais le contenu n'avait pas le même goût. Le fils avait hérité du sale caractère du père, mais sans l'humour, sans les plaisanteries, sans le pittoresque. il a lâché prise. Il a fermé boutique à peine un an après la mort de son père...C'était la DEUXIÈME MORT DE M'SIEUR MOATTI...